ORIGINE

" Dans l'énumération des Arts, on oublie trop souvent l'Art vestimentaire, qui pourtant a une importance aussi capitale ou presque que l'Architecture."

   F. Schuon
   "Perspectives spirituelles et faits humains"


   TRAJECTOIRE

Très jeune, Geneviève Sevin-Doering s'intéresse à la métaphysique, à la peinture, à la littérature.

Mais c'est face à l'incompétence dominatrice de couturières chargées de l'habiller que sa véritable vocation va se dessiner.

Elle apprend alors à réaliser ses propres vêtements et s'inscrit, dès l'âge de 16 ans, à l'Ecole de la Chambre Syndicale de la Haute Couture Parisienne.

Elle travaille ensuite en atelier de couture à Genève et à Lausanne. Le film de Laurence Olivier "Henry V" de Shakespeare lui révéle ce qui sera sa passion majeure, le costume.

1948, premier "Don Juan" de Mozart au Festival d'Aix-en-Provence, décorateur Cassandre, le célèbre affichiste. Geneviève Sevin-Doering rencontre Nadine Cassandre, alors Première d'atelier/Directrice de production chez le couturier Lucien Lelong, qui l'introduira dans le monde du spectacle et de la Haute-Couture et deviendra son maître.

Afin de compléter le métier de costumier de théâtre, Geneviève Sevin-Doering s'initie avidement à toutes les techniques possibles de coupe et de couture, étudie l'histoire de l'Art, du Costume et des Civilisations en fréquentant l'Ecole du Louvre, le Musée Guimet, le Musée de l'Homme, les Arts Décoratifs et constitue une documentation éclectique.

A partir de 1954 elle conçoit et réalise seule ou en collaboration des costumes de scène pour Michel Vitold, André Barsacq, Raymond Gérôme, Claude Régy, Georges Vitaly, Jean-Louis Barrault, Jean Vilar, Georges Wilson avec Jacques Le Marquet, Leonor Fini, Michel Bouquet, Laurent Terzieff, Michel Polnareff, Michel Fontayne, Antoine Vitez, Michel Cacoyannis, Marcel Maréchal, Jacques Karpo, Jacques Lazzini et bien d'autres, connus et inconnus.

En 1958, un texte précieux de Roland Barthes "Les maladies du costume de théâtre" lui permet d'affirmer ses critères fondamentaux, et conforte ses recherches sur la structure même du vêtement et le travail de la matière.

La couleur, élément capital de l'harmonie visuelle du costume, est depuis 1962 le domaine de son mari et collaborateur Reinhard Ubbelohde-Doering, teinturier-coloriste de théâtre. Ce métier, inédit à l'époque, est aujourd'hui indispensable dans le monde du spectacle.

Chaque pièce, et il y en eut beaucoup, est pour eux prétexte à résoudre les problèmes spécifiques liés au costume de scène par des innovations techniques qui révolutionnent alors les manières de voir et de faire.

En 1967-1968, Geneviève Sevin-Doering va plus loin encore et rompt totalement avec l'approche classique du vêtement, restrictive selon elle par rapport au besoin de liberté de mouvement de l'acteur et les impératifs de transposition scénique. Commence alors la longue élaboration du système de coupe en un seul morceau. Elle élargit au cours des années et avec succès l'application de ce nouveau concept au vêtement de ville et à la danse contemporaine.

En 1978, elle décide de quitter Paris et s'installe à Marseille où elle travaille pour de nombreuses compagnies et une clientèle de particuliers. Elle enseigne également à un cercle restreint d'étudiants et de jeunes professionnels, qu'elle veut curieux, motivés et inventifs. On peut citer dans le domaine de la Mode Fred Sathal, dans le costume de scène Dominique Fabrègue et beaucoup d'autres, peintres, sculpteurs, comédiens, décorateurs…. que leur rencontre avec Geneviève Sevin-Doering a marqué d'une manière ou d'une autre.


    GENESE D'UN CONCEPT

Femme de défi, Geneviève Sevin-Doering ne s'est jamais pliée aux normes. Sa curiosité exigeante et sa volonté de transgression l'ont faite très tôt s'interroger sur le rôle du vêtement et de sa coupe en fonction de la dynamique du corps.

L'origine de cette démarche est un refus multipolaire :

• refus de l'ordre établi que sclérosent ses limites,
• refus des réponses faciles : "parce que c'est comme çà qu'on fait", "parce qu'on ne peut pas faire autrement" à des pourquoi fondamentaux,
• refus d'un vêtement qui entrave le mouvement, contraint la dynamique corporelle naturelle et ne rend pas justice au corps qu'il revêt,
• refus du vêtement-boîte et du vêtement-déguisement.

A quarante ans, parvenue au sommet de sa carrière au TNP-Chaillot, Geneviève Sevin-Doering refuse, là aussi, la facilité de vivre sur une réputation et donc de risquer de ne plus pouvoir innover librement. Cette remise en cause la pousse à rejeter les techniques de coupe classique, comme un peintre jetterait ses pinceaux.


   NOUVEAU CONCEPT

Le concept du vêtement en un seul morceau, développé par Geneviève Sevin-Doering, constitue une manière résolument "autre" d'aborder la coupe et son rapport à la dynamique naturelle du corps.

Ce concept est basé sur :

• l'équilibre du vêtement sur le corps vivant,
• l'enveloppement continu,
• la recherche systématique de la liberté de mouvement dans une expression esthétique optimale.

Ces critères respectés, le vêtement ainsi conçu et réalisé forme une unité organique à la fois intemporelle et résolument contemporaine.

Cette technique fiable, à la disposition de tout créateur, permet de décupler les possibilités d'exaltation du vêtement (et du costume) par la libération de contraintes obsolètes.

Le champ d'application de ce concept est extrêmement vaste. Il révolutionne la façon de concevoir le vêtement et de le réaliser. L'approche de cette conception est synthétique, moderne et novatrice. Sa réalisation est renouvelée et simplifiée. Elle induit un autre regard, d'autres critères et d'autres performances. Les jeunes, d'ailleurs, ne s'y trompent pas, et beaucoup la considèrent comme une vision d'avenir.


    APPLICATIONS

Geneviève Sevin-Doering s'est attachée à l'application de son concept de coupe en un seul morceau à tous les secteurs concernés par le vêtement :

• vêtements de ville,
• costumes de scène,
• vêtements fonctionnels et professionnels (blouson de deltaplane, collant académique de danse, blouse de travail, manteau de moine cistercien actuel).

Cette méthode de coupe en un seul morceau représente également une nouvelle approche de travail dans le domaine industriel :

• conception en volume adaptée au corps vivant,
• liberté de mouvement,
• simplicité de montage,
• économie de moyens,
• rapidité d'exécution.

L'application industrielle de cette technique constituera une réponse novatrice et convaincante aux questions de souplesse et de coûts de production dont souffrent les professions du textile à l'heure actuelle.

       POURQUOI MARSEILLE ?

"Parce que Marseille m'a plu tout de suite, parce que c'est une ville cosmopolite aux potentialités immenses mais cachées.

Elle est située au croisement des civilisations et vit dans l'instant, dans le contraste et dans la tolérance, quoiqu'on en dise.

J'aime le regard acéré et bienveillant des marseillais, leur côté grec, secret et profond.

La décision de m'installer ici est venue d'un désir de tranquillité pour pouvoir accomplir ma démarche en paix, loin des sollicitations de la capitale.

Je voudrais aujourd'hui que l'avenir de ce travail soit lié à la ville qui l'a abrité."


   Geneviève Sevin-Doering